Notre histoire

Avec la création en 1974 du premier GRETA à Clichy-la-Garenne, non loin du quartier d’affaires de la Défense, l’Éducation nationale affirmait une ambition forte : celle de mobiliser les moyens matériels et humains des établissements scolaires pour permettre aux adultes de se former tout au long de la vie.

En à peine plus de cinq ans, près de 400 GRETA seront créés à travers tout le territoire national et dès 1979 plus de 300 000 stagiaires sont formés par an. Ils étaient 450 000 l’an passé, faisant de l’Éducation Nationale le premier opérateur de formation continue de l’Hexagone.

Une époque de pionniers

La création des GRETA (Groupements d’ETAblissements) fait suite au vote de la loi Delors en juillet 1971 qui instaure le droit des salariés à suivre une formation et l’obligation faite aux entreprises de participer à son financement. Cette loi qui porte « organisation de la formation professionnelle continue dans le cadre de l’éducation permanente » transpose dans le droit la volonté des partenaires sociaux, lors des accords de Grenelle en mai 1968, d’intégrer à la négociation collective la formation professionnelle des salariés. Il s’agit tout à la fois de permettre l’adaptation des travailleurs au changement des techniques et des conditions de travail et de favoriser leur promotion sociale.

A cette époque, l’Education nationale est déjà présente dans le domaine de l’éducation permanente avec les cours du soir. Mais Olivier Guichard, à la tête du ministère dans le gouvernement de Jacques Chaban-Delmas, veut aller plus loin et mobiliser les moyens des établissements scolaires pour mettre en place une activité à grande échelle de formation continue des adultes. C’est dans ce contexte qu’il sollicite Raymond Vatier, chef de service à la régie Renault. Cet ingénieur des Arts et Métiers connaît bien la question de la formation des adultes puisqu’il préside depuis 1960 aux destinées du Centre d’études supérieures industrielles (CESI) qui promeut des techniciens à des postes d’ingénieurs par la formation et l’usage de pédagogies novatrices souvent inspirées du monde anglo-saxon. (*)

Nommé directeur délégué à l’orientation et à la formation continue au ministère, Raymond Vatier va créer en 1973 un nouvel acteur : les Animateurs de Formation Continue (AFC). D’abord une poignée (ils sont moins de 50), ces enseignants recrutés dans tous les corps de l’Education nationale se voient investis de missions totalement novatrices dans l’institution : analyser et comprendre les besoins des divers publics de la formation continue (les salariés, les jeunes sans qualification, les travailleurs émigrés, les femmes désirant reprendre une activité professionnelle), organiser la formation de formateurs professionnels d’adultes, démarcher les entreprises …

« C’était l’aventure, il fallait tout inventer. Il fallait apprendre à négocier, à contractualiser une opération, à calculer un coût. Il fallait être capable d’analyser les besoins des entreprises, des salariés, les traduire en objectifs de formation. Nous étions dans une situation nouvelle, celle d’une relation directe avec les entreprises qui, au début, étaient très surprises par le fait que l’Education nationale ait quelque chose à leur vendre ! »

Un Animateur de formation Continue de la première heure

    Le rôle des AFC est également de fédérer les établissements scolaires sur les territoires pour assurer les formations. C’est ainsi qu’est créé le premier GRETA de France à Clichy-la-Garenne. La machine est lancée et prend très vite de l’ampleur : en à peine plus de 5 ans, près de 400 GRETA seront créés à travers tout le territoire national qui accueillent dès 1979 plus de 300 000 stagiaires par an. Le nombre d’animateurs de formation, devenus Conseillers en Formation Continue (CFC) en 1975, sera porté à plus d’un millier et chaque académie se voit dotée d’un Centre académique de formation continue (CAFOC) pour assurer leur formation et celle des formateurs d’adultes du réseau.

    Des chocs et des transformations

    Devenu en quelques années l’un des acteurs majeurs de la formation professionnelle continue, le réseau des GRETA devra tout au long de son existence s’adapter à un environnement changeant.

    Un premier tournant intervient dès la fin des années 1970, époque de licenciements massifs suite aux chocs pétroliers. Alors que dans les années d’expansion économique, les formations demandées aux GRETA par les entreprises concernaient surtout le perfectionnement et la promotion de leurs salariés, les mots d’ordre changent avec la crise et les problèmes de reconversion massive apparaissent. Les CFC apprennent à travailler avec de nouveaux partenaires : l’Agence Nationale Pour l’Emploi, les municipalités, les conseils généraux, les assistantes sociales de quartier. Partout en France, les moyens des GRETA sont mobilisés dans le cadre de programmes financés par l’Etat pour faire face aux besoins des demandeurs d’emploi ou des jeunes sans qualification qui peinent à intégrer le marché du travail.

    Cette période est aussi celle d’innovations pédagogiques importantes dont les GRETA seront les promoteurs : développement du tutorat en entreprises pour assurer en situation de travail la montée en compétences des salariés, raccourcissement des temps de formations avec le passage du CAP en un an pour les adultes en reconversion professionnelle qui possèdent déjà un diplôme équivalent ou supérieur ou encore création des « unités capitalisables » qui permettent à des adultes, en tenant compte de leurs acquis, de préparer et de présenter les différentes épreuves d’une certification par tranches successives dans le cadre de la formation continue.

    Formation en situation de travail, passage du CAP en 1 an au lieu de 2 dans le cadre de reconversions professionnelles, obtention de certifications par blocs … quelques unes des innovations portées par les GRETA dès les années 1970.

      Le mouvement de décentralisation, débuté avec les lois Deferre en 1983 et renforcé par la loi du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, transforme à son tour l’activité des groupements d’établissements. En effet, les régions se voient confier la compétence de pilotage de la formation professionnelle et de définition des priorités de formation en fonction des besoins locaux du marché du travail. Les actions de formation en direction des métiers en tension ou des publics en difficulté (demandeurs d’emplois, jeunes sans qualification) sont désormais réalisées dans le cadre de marchés pluriannuels de grande ampleur attribués sur appels d’offres. L’activité des conseillers en formation évolue progressivement vers la rédaction de réponses aux attentes formulées par les instances publiques sur un marché désormais très concurrentiel.

      De leur côté, les entreprises ont pris conscience de l’enjeu des ressources humaines et de formation dans la gestion de leur activité et leur niveau de productivité. Les plus grandes d’entre elles créent leurs propres pôles internes de formation et les autres entreprises font appel aux OPCA (Organismes Paritaires Collecteurs Agréés) dont la mission est de collecter, mutualiser et redistribuer les obligations financières versées par les entreprises au titre de la formation professionnelle. Le rôle de conseil des CFC auprès des entreprises s’en trouve transformé et leur activité se recentre autour du montage de dossiers de prise en charge financière des Congés Individuels de Formation (CIF) et de réponse aux sollicitations des OPCA qui jouent désormais un rôle de conseil auprès des entreprises qui désirent former leurs employés et auprès des salariés qui souhaitent se former. Enfin, les lois successives qui vont introduire le Droit Individuel à la Formation (DIF) en 2004, transformé en Compte Personnel de Formation (CPF) en 2015, et l’accompagnement renforcé de la mobilité professionnelle avec la mise en place des en 2018 du Projet de Transition Professionnelle (PTP) en lieu et place des CIF rendent l’individu acteur de son parcours de formation. Ainsi, la gestion des besoins spécifiques de chaque individu prend l’ascendant sur une réponse collective obligeant les GRETA à adapter leur ingénierie de formation pour concilier l’individualisation des parcours et l’équilibre financier nécessaire au bon fonctionnement des structures.

      La particularité des GRETA est d’appartenir à l’Éducation nationale mais d’être autonomes dans leur financement, ce qui les oblige, il y a 50 ans comme aujourd’hui, à une grande agilité pour s’adapter aux besoins locaux de formation et aux évolutions du marché de la formation professionnelle.

        Des chocs et des transformations

        En 50 ans, beaucoup de choses ont changé dans notre réseau. Le public que nous accueillons s’est élargi. D’abord majoritairement constitué de salariés venus chercher dans nos formations de nouvelles compétences pour s’adapter aux besoins des entreprises, celui-ci compte aujourd’hui un grand nombre de demandeurs d’emploi en quête des qualifications qui permettront leur employabilité et de jeunes adultes à travers le développement très fort de l’apprentissage.

        Dans le même temps, nos missions se sont étendues. Accompagnement à la validation des acquis de l’expérience, bilan de compétences, conseil à la mobilité professionnelle, ingénierie pédagogique : notre offre couvre désormais un large spectre de besoins liés à l’évolution des qualifications et à l’adaptation des compétences. Des changements, donc, mais une ambition qui reste la même : permettre à chaque personne que nous formons ou que nous accompagnons de donner vie à ses projets professionnels.